ISEM – UNIVERSITÉ MONTPELLIER 1
Master 2 – Marketing Vente – Parcours Études et Décisions Marketing

Pratique des études marketing
Échelle de mesure : le fanatisme envers une marque 
LE CAS D’APPLE

Déborah FASOLO et Myriam FENIET
INTRODUCTION
          La notion de capital-marque a bien évolué depuis son apparition dans les années 1980. Si le capital-marque est aujourd’hui défini comme « l’ensemble des attitudes et comportements de consommateurs associés à une marque », il comprend selon Aaker (1991), plusieurs dimensions qui ont longtemps fait l’objet d’études marketing. Ces dimensions sont donc la fidélité à la marque, la notoriété de la marque, la qualité perçue, les associations de marques et les autres atouts liés à la marque.
          Il est donc essentiel dans ce cadre-là de se pencher sur le concept d’attachement à la marque qui a lui-même fait l’objet de nombreuses études. Lacoeuilhe le définit comme « le sentiment de proximité, le lien émotionnel fort entre le consommateur et la marque ». En effet, avec le récent développement du marketing relationnel et participatif, il est plus que primordial de s’intéresser au phénomène d’attachement à la marque comme sujet de recherche afin de justifier l’impact d’un tel comportement sur les ventes réalisées.
          Cependant depuis quelques années, un nouveau type de comportement est identifiable, à savoir le fanatisme autour de produits de marque. Ce phénomène se manifeste par le fait qu’une marque se mue en quelque sorte en une religion par l’événementialisation de la sortie de ses nouveaux produits. Il n’est donc pas étonnant de voir aujourd’hui, des files de gens s’entasser devant un magasin pour l’arrivée d’un nouveau produit ou d’une ouverture de magasin. Ceci traduit un sentiment intense de « désirabilité » lié à la marque. La marque qui a su susciter ce sentiment va s’efforcer de l’entretenir en laissant les consommateurs penser qu’ils ont accès à un produit moderne, rare et exceptionnel. Ce sentiment sera généré par le fait que l’on va mettre en place des listes d’attente pour obtenir le produit en question, et le tourner en produit star.
          Depuis plusieurs années, des chercheurs ont donc menés une réflexion marketing sur le développement de fans, par rapport à sa fidélité à la marque, à l’importance de l’image de marque et au déploiement de la consommation communautaire déclenché par ce sentiment d’appartenance excessif. En effet, dans un premier temps, le marketeur ne s’est pas intéressé à ce comportement considéré comme « anormal, déviant et appartenant à une minorité non significative » comme défini par J. Redden et C. J ; Steiner (2000). Or, ces dernières décennies ont été marquées par le passage d’un marketing transactionnel à un marketing relationnel, et par l’évolution du marketing vers un marketing participatif et communautaire qui a remis le consommateur au centre de toute réflexion vis-à-vis de sa relation avec la marque. Ainsi, on voit apparaître ce qui se rattache à la « Consumer Culture Theory » de E.J. Arnould et C.J. Thompson (2005), c’est-à-dire le fait que les études marketing se focalisent sur l’impact que peuvent avoir les comportements sociaux et culturels sur les choix de consommation.
          Nous nous intéresserons dans le cas présent au fanatisme de la marque, notamment via l’étude comportementale des fans d’Apple. Dans un premier temps, nous définirons le domaine conceptuel de notre étude en nous concentrant sur les concepts d’attachement à la marque et de fans. Dans un second temps, nous allons passer à la phase exploratoire en établissant un questionnaire basé sur les dimensions, composantes et items en lien direct avec notre concept. Enfin, en tout dernier lieu, nous établirons une analyse de ces questionnaires pour déterminer la validité de notre étude, et développer un point de vue critique autour de ce concept, pour finir par une conclusion sur l’implication du consommateur dans le développement d’une marque.
I. Définition du domaine conceptuel
    A.  DE L'ATTACHEMENT AU FANATISME
            Le concept de fanatisme est étroitement lié à celui d’attachement à la marque, à tel point que nous pouvons parfois parler « d’attachement fanatique ». De nombreux auteurs ont proposé à ce jour plusieurs définitions de ce concept. Celle proposée par Cristau en 2003 définit notamment l’attachement à la marque en prenant en compte les notions d’amitié et de dépendance : « une relation psychologique, émotionnelle, forte et durable à une marque qui résulte d’une concomitance de sentiments d’amitié et de dépendance vis-à-vis de la marque ». La composante conative prend ici plus d’importance.
            Afin d’opérationnaliser ce concept à travers les diverses définitions qui ont été proposées, différents auteurs ont proposé des échelles de mesure. C’est dans cette optique que Fournier a développé en 1994 le « Brand Relationship Quality » (BQR) présentant six facettes différentes du concept réparties à partir des dimensions cognitive, affective et conative de l’attitude. Ainsi, il caractérise le cognitif via l’intimité et la qualité du partenaire, le conatif via la dépendance comportementale ainsi que l’engagement et enfin, l’affectif qui se rattache à la passion ainsi qu’à l’amour nostalgique. Considérant l’expression « Attachement fanatique », le fanatisme serait donc un degré d’intensité de l’attachement.
            De ce fait, la dimension conative résultant de l’affective et notamment les comportements en direction de la marque, prend une place plus grande. Ces manifestations résultant d’un attachement excessif sont d’une part plus nombreuses, mais également plus fortes en termes d’engagement. Ils sont de ce fait souvent liés à des formes de concessions en termes de temps ou d’argent. Ceci s’explique par un ancrage et un enrichissement de la dimension affective plus forts que dans le cas d’un simple attachement. De plus, comme expliquée précédemment, la dimension cognitive est affectée par l’affective de par l’effet de halo. Les croyances et opinions sont bien plus ancrées et donc difficilement discutables, proportionnellement à l’intensité des sentiments ressentis par le consommateur à l’égard de la marque.

    B.  FAN ET FANATISME
            Le concept de « fanatisme » n’a que peu évolué depuis ses origines. Du latin fanaticus qui signifie « ce qui concerne le temple », ce terme prend ses origines dans la religion, et notamment les conséquences que le dévouement pour un dieu peut induire chez un individu. Pourtant, l’abréviation « fan » a quant à elle pris son indépendance sémantique et est communément employée dans la langue française ; elle désigne un individu ressentant un certain enthousiasme à l’égard d’une célébrité, d’une marque, d’un sport… les sources sont ici très variées, mais ne concernent en aucun cas la religion, domaine pour lequel nous emploierons plutôt le terme « fanatique ». Pourtant, malgré cette distinction fondamentale, le terme « fan » souffre aujourd’hui d’une connotation négative et semble être souvent perçu comme une insulte. En effet, aujourd’hui, deux visions sont à prendre en compte quand nous utilisons le terme « fan ».
            Tout d’abord, le sens commun se veut d’utiliser ce terme de manière autonome, en définissant cela comme un enthousiasme marqué vis-à-vis d’une marque, d’un individu, d’un sport… mais cette définition ne doit en aucun cas occulter l’origine étymologique de ce terme qui provient, rappelons-le, du terme « fanatisme ». Ceci s’explique notamment par certaines composantes de l’attitude, présentes aussi bien chez un certain type de fan Apple que chez un fanatique religieux. En prenant en compte certaines composantes des dimensions de l’attitude, un subtil rapprochement peut en effet s’établir entre les deux termes et permet ainsi de faire la distinction entre un fan modéré et un fan plus excessif.   
            Pour commencer, d’un point de vue affectif, le fanatisme induit le rejet. Or, bien que les tensions entre l’ancien PDG d’Apple aujourd’hui décédé, Steve Jobs, et Bill Gates, fondateur de la société rivale Microsoft, se soient apaisées, celles opposant les fans des deux entités sont encore bien présentes. Mieux encore, les fans les plus dévoués refusent toute critique négative visant la marque et la défendent sans hésiter. Sur un aspect cognitif, le fanatisme fait intervenir des croyances extrêmes et des idéologies allant au-delà du rationnel. Et la marque l’a bien compris, présentant chaque nouveau produit comme étant révolutionnaire et unique en dépit de leurs améliorations parfois discutables. Bien qu’il ne repose pas forcément sur du tangible, l’ancrage de ces croyances dans la dimension cognitive de l’attitude de l’individu sera tel que remettre en question ces dernières relève de l’impossible. Cela dit, en considérant l’absence de limites des fanatiques pouvant aller jusqu’à se sacrifier au nom de leur foi, ceci ne concerne en rien les fans même les plus enthousiastes d’Apple. En effet, la dimension affective a une incidence sur le comportement impliqué du fan, qui est certes non négligeable, mais qui n’atteint pas pour autant le niveau de gravité des actes commis par des fanatiques. C’est pourquoi nous distinguerons de manière plus sobre et modérée deux types de fans présentant deux niveaux d’engagement différents : d’une part, le fan actif, pour qui les dimensions cognitive et affective de l’attitude seront plus fortes et auront donc un impact plus marqué sur son comportement ; d’autre part, le fan passif, vivant avant tout son expérience avec la marque, sans pour autant que cela affecte grandement la composante conative de son attitude et donc sa volonté d’agir auprès d’autrui.
            Prenant en compte ces éléments et reconsidérant le concept dans un contexte marketing, le fanatisme se caractériserait donc par un attachement plus ou moins excessif du consommateur vis-à-vis de la marque, ayant pour effet d’induire des croyances en faveur de celle-ci qui sont irrationnelles et difficilement discutables. L’esprit critique de l’utilisateur n’a plus réellement toute sa place, car la réputation de la marque et les idées communément admises la concernant sont solides, stables et unanimes. L’effet de halo, théorie formulée par Edward Thorndike en 1920 est important. La confiance et l’appréciation positive que le consommateur aura concernant la marque influeront grandement sur ses opinions concernant les produits. Nous allons ici de l’affectif vers le cognitif ; la relation n’est ici pas rationnelle.
            L’échelle de mesure présentée ci-après se veut donc de dresser des typologies de fans en fonction du degré d’intensité déclaré pour chaque item illustratif des différentes dimensions et composantes de l’attitude.
II. L'éCHELLE DE MESURE
    A.  LE CONCEPT
            Longtemps négligée, la relation client est aujourd’hui devenue un aspect primordial de l’offre qu’une marque soumet à ses consommateurs. En effet, l’intensification de la concurrence sur l’ensemble des marchés et le besoin de nouveauté dû à un consommateur toujours plus complexe contraint les marques à devenir plus attachantes afin de fidéliser ses clients. On s’intéresse maintenant à son cycle de vie, sa « Lifetime value ». C’est pourquoi les marques à l’image d’Apple ayant su créer une communauté de fans indéfectibles sont bien souvent prises comme modèle.
            En effet, avant d’avoir des clients ou des consommateurs, Apple a surtout des fans. De nombreuses manifestations propres à la marque permettent de l’illustrer : frénésie des consommateurs au lancement de nouveaux produits, rupture de stock de la biographie de son défunt fondateur Steve Jobs, existence de nombreux forums et pages Facebook dédiées à la marque, grand nombre d’actes d’achats moyen par consommateur… Tout laisse à croire qu’Apple a une communauté de fans particulièrement solide. Pour preuve, de nombreuses études ont démontré que la marque possédait les clients les plus fidèles. C’est par exemple ce qu’a fait ressortir une enquête de l’institut GfK menée auprès de 4 500 personnes interrogées en Grande-Bretagne, France, Allemagne, Italie, Espagne, Brésil, Chine, Japon et États-Unis. Selon les résultats, 84 % des utilisateurs d’iPhone affirmaient qu’ils choisiraient un iPhone au moment de remplacer leur appareil quand seulement 48 % affirmaient la même chose au sujet des Blackberrys. Extrêmement présente dans les médias, la firme de Cupertino suscite les controverses depuis maintenant plusieurs années. Qu’elle soit admirée ou critiquée, la marque Apple ne laisse donc personne indifférent, et redessine plus nettement les frontières distinguant les fans des clients. Ces éléments justifient donc notre choix d’étudier les relations qu’entretiennent les fans vis-à-vis de la marque Apple.

    B.  DIMENSIONS, COMPOSANTES ET SOUS-COMPOSANTES
            Afin d’établir différentes typologies de fan, cette échelle de mesure se décompose selon les trois dimensions traditionnelles de l’attitude : cognitive, affective et conative, chacune subdivisée en composantes. Certaines sont décrites via des sous-composantes afin de mesurer au mieux le différent degré de fanatisme des répondants.
            1. La dimension cognitive
            La dimension cognitive désigne un ensemble stable de connaissances, croyances et opinions, et se décompose en trois composantes :
 - Les connaissances désignent l’ensemble des faits concrets que le répondant connait sur la marque… cette composante se subdivise en deux sous-composantes relativement importantes en termes de connaissance : « Actualité » et « Culture » de la marque. Cette dernière se réfère notamment aux Keynotes. Les Keynotes sont des conférences ayant lieu deux à trois fois par an, également retransmises sur internet, et durant lesquelles le PDG d’Apple présente les nouveaux produits avant leur lancement. Leur mise en scène très soignée, et les potentielles révélations attendues et relayées par les médias, font d’elles des évènements incontournables pour une grande partie de la communauté des aficionados, et provoquant un grand engouement médiatique. C’est donc un élément primordial de la « brand culture », définie comme étant l’ensemble des manifestations de la marque permettant de faire passer ses valeurs auprès de ses consommateurs.
 - Les croyances se réfèrent à des idées stables et fortement ancrées dans l’esprit du consommateur. La puissance de cet ancrage prend également sa source dans le partage de cette croyance au sein d’une communauté déterminée. Elles pourront être également difficilement remises en cause du fait qu’elles font appel à la foi plutôt qu’à la raison.
 - Les opinions désignent un construit plus rationnel, résultant directement de l’expérience utilisateur. Ce sont des jugements, des avis personnels plus argumentés que les croyances. Elles sont introduites par « Je pense que… » et laissent donc des possibilités plus ou moins larges de débat.

            2. La dimension affective
            La dimension affective est primordiale dans le concept de fanatisme. La marque Apple a notamment pris soin dans sa communication de créer ce lien affectif entre ses produits et ses utilisateurs, et s’emploie régulièrement à l’entretenir. L’objectif de ses campagnes de communication est avant tout affectif. Chacune de ses manifestations a pour but de créer du lien en suscitant des émotions positives chez la cible. Cela dit, le fanatisme qui peut en découler est susceptible d’engendrer également des réactions plus négatives telles que le rejet d’autres marques concurrentes, de par la passion vouée à ladite marque par certains. Cette dimension comporte six composantes :
 - La confiance est soumise à de nombreuses définitions données par de nombreux auteurs. Cela dit, nous pouvons la définir comme étant « un état psychologique se caractérisant par l’intention d’accepter la vulnérabilité sur la base de croyances optimistes sur les intentions ou le comportement d’autrui. ».[1] De nombreux chercheurs s’accordent pour reconnaître le caractère fondamental dans la construction et le maintien de la relation consommateur-marque et l’aspect prédictif sur l’engagement ou la satisfaction. Les nombreuses crises affectant les grandes entreprises ainsi que la crise économique actuelle renforcent la difficulté pour les marques d’établir une relation de confiance avec les consommateurs. 
 - Le bien-être désigne le fait d’être bien et satisfait dans ses besoins. Pour mesurer cela, nous nous sommes axés sur deux sous-composantes : l’acte d’achat en lui-même et notamment le bonheur qu’il procure à l’acheteur, et la visite en magasin dans les Apple Stores. La satisfaction d’achat est en effet un sentiment quasiment intrinsèque pour le consommateur lambda, notamment lorsque cela concerne des produits ne remplissant pas des besoins primaires. Ici, ce n’est pas tant la marque qui en est la source, mais bien l’achat en soi et le renouveau qu’il procure. C’est pourquoi nous avons choisi ici l’item « Je suis heureux lorsque j’achète un nouveau produit Apple.», plus fort que la simple satisfaction. Pour compléter notre analyse de cette composante, nous avons également voulu aborder l’aspect « culture » via les Apple Stores. En effet, ces derniers sont des éléments incontournables de la culture de marque d’Apple. D’un design épuré et ultra-connecté, ces magasins sont plus que des points de vente. Ils promettent l’appel de nombreux sens pour le consommateur, de l’architecture rappelant parfois celle des églises jusqu’au Genius Bar - le S.A.V. -, en passant par le merchandising ou la force de vente formée pour établir une relation toujours plus personnalisée et soignée avec le client. Autrement dit, les Apple Stores ont été créés de façon à exprimer l’essence même de la marque « Nous sommes une marque unique au service de gens qui le sont tout autant. »
 - La passion est une dimension intrinsèque du concept de fanatisme. Elle est à l’origine du comportement parfois irrationnel de l’individu vis-à-vis d’une marque, d’un individu, d’une religion… Le fan est un fan en premier lieu, car celui-ci adore la marque.
 - L’agacement désigne l’émotion ressentie à l’égard de quiconque critique la marque de par l’identification de l’individu vis-à-vis de celle-ci. Dénigrer la marque qu’il aime tant revient à le dénigrer lui-même.
 - Le rejet est induit par le fanatisme. Autrement dit, un certain profil de fan peut rejeter les marques concurrentes à Apple dans son processus d’achat, voir même les dénigrer. Parfois, ce rejet peut s’élargir à l’identité même de l’entreprise. Par exemple, Apple s’est longtemps jouée de Microsoft via des spots publicitaires sarcastiques et manichéens, présentant l’entreprise rivale tel un rouleau compresseur puissant, peu créatif et ringard. Apple se présentait alors comme une start-up innovante, décontractée, unique et ouverte d’esprit. « Dénigrer l’autre pour se valoriser » a longtemps été le fer-de-lance de la communication d’Apple, qui aimait durant un temps se présenter comme le modeste et créatif superhéros luttant contre la puissance oppressante des géants conformistes de l’informatique. Une certaine intolérance de par la passion vouée par la marque, mais également motivée par cette dernière peut donc émerger auprès de ses fans les plus passionnés.
 - La relation est un concept plus général se voulant de caractériser la place que prend la marque dans la vie du consommateur. Elle peut être positive ou négative et avoir une place plus ou moins grande dans celle-ci. Dans le cas d’Apple, nous avons voulu mesurer son aspect « incontournable » dans le quotidien du répondant, qui désigne d’une part son caractère positif dû notamment à des expériences qui le sont tout autant ; et d’autre part une grande présence dans l’existence du répondant qui laisse alors penser que ce dernier lui consacre du temps et/ou de l’argent. Nous voulons de ce fait mesurer la force d’une éventuelle proximité entre la marque et son consommateur.
[1] Academy of Management Review, vol. 23, No. 3,‎ 1998, p. 393-404

            3. La dimension conative
            La dimension conative représente la facette émergée de l’iceberg. Dans notre cas, nous passons de l’affectif au conatif en passant par le cognitif, car fortement motivés par l’objectif affectif de la communication d’Apple. Les comportements sont donc induits par les deux dimensions qui les précèdent. Pour générer ces items, nous nous sommes notamment basées sur nos observations grâce aux retombées médiatiques ainsi qu’aux articles de presse concernant le comportement des fans les plus impliqués de la marque. Pour décrire la richesse de cette dimension, nous nous sommes notamment basées sur cinq composantes :
 - La fidélité est devenue un enjeu majeur de par un environnement concurrentiel de plus en plus rude. Afin d’être les plus exhaustives possible tout en restant synthétiques afin de ne pas proposer un questionnaire trop long, nous avons retenu trois sous-composantes : la première présente la fidélité sous un aspect plus quantitatif, en abordant notamment les investissements financiers que le répondant est prêt à faire. Nous utilisons ici le terme « investissements », car Apple se trouve globalement sur un marché sous-entendant des achats onéreux et utilisables sur du long-terme. Le risque est donc plus grand. C’est pourquoi la sous-composante « Exclusivité » a également été prise en compte. En effet, ce type d’achat – Ordinateurs et Smartphones notamment - nécessite une longue réflexion afin de maximiser les chances de faire un choix judicieux. Dans ce contexte, le consommateur comparera, ira en boutique, consultera des avis d’utilisateurs ou des tests de produits… Nous nous trouvons ici classiquement sur un processus de résolution extensive de problème. Or, un consommateur ne se posant pas la question de la marque dans un processus de décision prenant normalement beaucoup de temps peut éventuellement être considéré dans l’une des strates posant les plus hauts degrés de fanatisme, après étude des réponses données aux autres items significatifs. Enfin, la durée est l’une des sous-composantes permettant de définir une frontière entre différents profils de fans, car illustrative d’un engagement plus ou moins fort auprès de la marque. Ainsi, plus les expériences avec elle seront nombreuses, car installées dans la durée, plus l’attitude sera proportionnellement enrichie et l’ancrage potentiellement fort.
 - La recommandation, quand elle est en faveur de la marque, est d’autant plus rare et donc impactante. En effet, il est bien connu que le nombre d’individus qui expriment leur insatisfaction à l’égard d’une marque ou d’un produit après une mauvaise expérience est bien plus grand que dans le cas contraire. De ce fait, la recommandation, de par sa rareté, caractérise un engagement authentique du consommateur auprès de la marque. Ses possibilités d’expansion sont d’autant plus variées de par la tendance de plus en plus structurelle des réseaux sociaux. Elle permet ainsi d’augmenter le nombre de personnes susceptibles d’entendre la recommandation du fan.
 - L’investissement personnel est l’une des composantes clés du fanatisme, permettant de faire la distinction entre différents types de fan. Ainsi, contrairement à la composante « Passion » qui ne permet pas forcément de distinguer à elle seule un haut degré de fanatisme, celle désignant l’investissement personnel est un indicateur plus probant, de par la perte de temps ou d’argent que cela sous-entend pour l’individu. Ceci permet donc d’aborder indirectement les notions de considération et de mérite. Cette marque mérite-t-elle que je perde quelque chose pour elle ? C’est pourquoi nous avons subdivisé cela en deux sous-composantes : « Temporel » et « Géographique », toujours en rapport avec les concessions que l’individu est prêt à faire pour acheter un produit Apple dans un Apple Store, autrement dit, pour établir une continuité entre l’expérience et l’achat final.
 - L’implication communautaire désigne l’activité du répondant au sein d’une ou plusieurs communauté(s) dédiée(s) à la marque. Cette composante est subdivisée en deux sous-composantes nous permettant de présenter deux facettes : d’une part, son intérêt pour la communauté qui se veut de mesurer le statut passif de l’internaute vu en tant que consommateur d’informations ; d’autre part, sa participation qui se veut quant à elle de mesurer le degré d’activité au sein de celle(s)-ci ; ici l’internaute y est vu comme créateur de contenu.
 - La défense désigne le fait de défendre la marque quand celle-ci est critiquée. Autrement dit, ceux n’hésitant pas à plaidoyer en faveur de celle-ci, qu’importent la forme et le fond de la critique, sont plus susceptibles de réagir sur la base d’un comportement affectif que cognitif.

III. LE QUESTIONNAIRE
            De cette échelle de mesure, en a été produit un questionnaire permettant de mesurer les items soumis lors de la réflexion précédemment expliquée.
    A.  Caractéristiques du questionnaire
            Dans ce cadre, 25 questions, dont 22 sous forme d’items, ont été soumises aux répondants. Celles-ci se présentaient sous une forme affirmative. Le répondant devait ainsi marquer son degré d’accord ou de désaccord, notamment grâce à des échelles de Likert sur cinq échelons de « Pas d’accord du tout » à « Tout à fait d’accord ». Nous avons volontairement voulu insérer un échelon intermédiaire « Ni d’accord, ni pas d’accord » afin que les indécis puissent se positionner. Nous pouvons ainsi mieux distinguer les individus profondément fans de la marque, dont l’ensemble des composantes sont les plus ancrées. Les questions posées sont quant à elles volontairement simples afin de pouvoir maximiser nos chances d’obtenir des informations fiables. En effet, l’internaute aura ainsi plus de latitude pour répondre aux questions posées.
    B.  Administration
            Ce questionnaire a été auto-administré durant trois jours sur internet, d’une part sur les réseaux sociaux, notamment Facebook et Twitter, mais également sur les forums dédiés aux utilisateurs des produits Apple. En effet, l’un des intérêts de l’échelle de mesure est que le répondant peut facilement répondre tout seul aux questions, car généralement courtes et simples à comprendre. Leur accessibilité lui permet ainsi de pouvoir exprimer facilement son opinion. Nous avons notamment retenu cinq terrains virtuels :
 - MacGénération et MacBidouille, sites incontournables pour tous les aficionados de la marque Apple ;
 - Mac4Ever et iPhoneAddict.fr qui sont des forums moins connus et actifs que les deux précédents, mais comportant une communauté de fans non négligeable ; 
 - HardWare.fr, forum plus généraliste concernant le matériel et les logiciels informatiques.
À l’issue de ces trois jours, 117 observations ont été récoltées. Une quatrième étape a donc consisté à les analyser afin d’en tirer une interprétation.

IV. RéSULTATS ET ANALYSE
            L’échelle que nous avons choisie pour notre étude est celle de Likert expliquée dans la partie précédente. Nous avons pondéré notre échelle afin de pouvoir voir l’importance de chaque composante de chaque dimension. De ce fait :
 - 1 représente la mention « Pas du tout d’accord » ou « Pas du tout »
 - 2 représente la mention « Plutôt pas d’accord » ou « Plutôt non »
 - 3 représente une mention neutre « Ni d’accord, ni pas d’accord » ou « Cela dépend »
 - 4 représente la mention « Plutôt d’accord » ou « Plutôt oui »
 - 5 représente la mention radicale « Tout à fait d’accord » ou « Tout à fait »
Ce questionnaire a été administré auprès de 117 personnes possédant au moins un produit de la marque Apple.
    A.  La dimension « Cognitive »
            La dimension « cognitive » a été divisée en trois composantes distinctes, à savoir la connaissance de la culture de la marque et de son actualité, la croyance et l’opinion qu’ont les utilisateurs Apple au sujet des produits de la marque.
Pour définir cette dimension, nous avons étudié les réponses aux questions suivantes :
 - « Je me tiens informé des sorties de nouveaux produits Apple. »
 - « Les Keynotes sont des évènements à ne pas manquer. »
 - « Apple conçoit les meilleurs ordinateurs personnels et Smartphones au monde. »
 - « Je pense que les produits Apple sont puissants. »
 - « Je pense que les produits Apple sont robustes. »
 - « Je pense que les produits Apple sont ergonomiques. »
            D’après l’analyse des items proposés, nous sommes en mesure de dire que la dimension cognitive du fanatisme à la marque est très marquée. En effet, si l’aspect « connaissance dans la culture de la marque » semble moins marquant pour les fans de la marque, il ressort cependant que les réponses aux autres domaines sont assez semblables. De sorte que, la croyance dans les produits Apple, la connaissance de l’actualité de la marque et l’opinion des utilisateurs envers les produits distribués restent tout à fait positives.
            On retrouve donc dans le diagramme en forme de radar que ces trois composantes de la dimension cognitive sont particulièrement fortes chez les utilisateurs d’Apple interrogés, et que la notion d’idéologie liée au fanatisme est bel et bien présente.
            Ces faits devraient être confirmés par l’engouement des fans à manifester leur affection à la marque et à agir en accord avec ce puissant sentiment attachement excessif à une marque.
    B.  La dimension « Affective »
            La dimension affective relève quant à elle de six composantes qui sont la confiance en la marque, le bien-être généré par l’acquisition d’un produit Apple ou par l’expérience vécue avec la marque, la passion à l’égard de la marque, l’agacement vis-à-vis des critiques à l’égard de leur icône, le rejet des autres marques et enfin la relation entretenue avec la marque.
            Afin de mettre en avant ces différentes composantes, notre analyse s’est portée sur les affirmations suivantes :
 - « J’ai une confiance totale en cette marque. »
 - « Je suis heureux lorsque j’achète un nouveau produit Apple. »
 - « Je ressens du plaisir à aller dans un Apple Store. »
 - « J’adore la marque Apple. »
 - « Je me sens agacé lorsque des individus critiquent la marque Apple. »
 - « Je n’aime pas les marques concurrentes. »
 - « Apple est devenue une marque incontournable dans ma vie. »
            Si les réponses à ces affirmations restent plus pondérées puisque tendant vers le « plutôt oui » que le « tout à fait », il semble pourtant évident que la confiance en la marque, le bien-être issu de l’expérience magasin et de l’acquisition d’un produit Apple et la relation entretenue avec la marque sont des éléments essentiels pour les adeptes d’Apple. En outre, la retenue visible lors du plaisir éprouvé lors de la visite d’un Apple Store peut s’expliquer par une partie des utilisateurs qui ont ressenti comme une nécessité de devoir se rendre chez Apple pour un inconvénient technique.
            On peut noter néanmoins que les fans d’Apple se sentent moins concernés par la notion de rejet des autres concurrents d’une marque et d’agacement éveillé par la critique vis-à-vis de la marque adulée. En effet, cette attitude peut s’expliquer de plusieurs manières, d’une part parce que le fanatisme lié à une marque ne prend pas l’ampleur du « fanatisme religieux » qui consiste à rejeter les idéologies autres que la sienne et à éprouver de l’irritation et de l’exacerbation à l’égard des opposants, critiques envers l’idéologie adoptée. D’autre part, ces deux notions étant jugées plutôt péjoratives, le répondant aura tendance à revoir sa réponse de peur d’être jugé par l’administrateur du questionnaire. En outre, cela s’explique également par plusieurs degrés dans le fanatisme lié à la marque, et que les fans considérés comme des militants ou partisans de la marque sont moins nombreux que les simples ambassadeurs ou sympathisant de la marque, se préoccupant avant tout de leur plaisir dans la relation engagée avec la marque que du regard des autres. On peut donc parler de neutralité voire d’indifférence à l’égard de l’opinion d’autrui de la part de la majorité des fans. Enfin, le rejet est également un phénomène qui se produit inconsciemment, il est donc difficile pour les répondants, de réaliser qu’ils rejettent les marques concurrentes d’Apple, cette réaction se manifestant instinctivement et tacitement en réponse à l’adoration d’une marque.
    C.  La dimension « Conative »
            En ce qui concerne la dimension conative, on distingue cinq composantes bien distinctes qui se révèlent être, la fidélité à la marque, l’investissement personnel en termes de temps et de déplacements, la recommandation, l’implication dans la communauté Apple et la défense de la marque face aux critiques.
            On utilisera les allégations suivantes pour analyser ces cinq composantes :
 - « J’achète tous les produits Apple. »
 - « J’achète des produits Apple depuis longtemps. »
 - « Je n’achète que des produits Apple. »
 - « Je recommande régulièrement cette marque à mon entourage. »
 - « J’achète tous mes produits Apple dans des Apple Stores. »
 - « Je suis prêt à attendre plusieurs heures devant un Apple Store pour la sortie d’un nouveau produit. »
 - « Je m’informe régulièrement sur un ou plusieurs site(s) communautaire(s) dédié(s) aux fans Apple. »
 - « Je participe activement aux conversations sur un ou plusieurs site(s) dédié(s) à la marque Apple. »
 - « Je n’hésite pas à prendre la défense de la marque quand celle-ci est critiquée. »
            On constate que la plupart des sondés sont en désaccord avec les items relevant de la fidélité en termes d’investissement financier et d’exclusivité, d’investissement personnel géographique et temporel, d’implication en tant que participant actif et de défense de la marque. Effectivement, étant donné les circonstances économiques actuelles, il est normal que même les plus grands fans d’Apple ne puissent consacrer leur budget à l’achat de tous les produits de la gamme Apple, ce qui explique du même fait, que le fan va acheter des produits similaires à moindre prix pour compenser cette perte, diminuant de ce fait le pouvoir d’exclusivité d’Apple. En outre, ces composantes ainsi que celles relevant de l’investissement personnel, l’implication par la participation active à des forums dédiés à la marque, et à la défense de la marque relèvent d’un type de fans très virulents et qui cherchent à embarquer les autres consommateurs dans son fanatisme. Ce type de fans étant moins présent sur le total de la population adepte d’Apple, il est donc faiblement représenté dans notre échantillon. De plus, avec aujourd’hui la rapidité de mise en place de la disponibilité de ces produits par le biais d’Internet, le fan d’Apple est donc moins enclin à faire le déplacement et à passer du temps pour obtenir ce même produit dans un délai très restreint et à domicile.
            Cependant, le nombre de sympathisants et d’ambassadeurs de la marque voire de partisans de la marque restent assez représentés dans notre échantillon, puisque l’on constate que le fan lambda va être acheteur Apple depuis un certain temps, lié certainement à la confiance qu’il a dans les produits Apple et qu’il reporte par effet de halo à la marque. Ainsi, ce fan va également être plus enclin à recommander cette marque à son entourage. Enfin, il semble évident que, quel que soit son profil, le fan Apple va fortement manifester son intérêt à la marque en allant s’informer régulièrement sur des sites communautaires Apple, pouvant ainsi ressentir son appartenance à un groupe. De sorte que l’on voit apparaître un véritable engouement pour la marque qui nécessite de montrer son affection à la marque par le partage de « j’aime » sur les communautés virtuelles tel que Facebook, ce qui se définit bien comme un comportement addictif de fan envers la marque Apple.

    D.  Le degré de fanatisme lié à la marque
            Grâce à une analyse plus poussée par le biais de l’utilisation d’une étude ACM (Analyse des Composantes Multiples) avec l’utilisation des résultats du logiciel SPAD, nous sommes capables de définir plusieurs groupes de fans distincts que nous allons représenter par des cercles de couleurs associant des individus aux items étudiés, caractérisant un comportement de fans. Les variables sélectionnées sont celles qui sont le plus représentatives d’un comportement de fan, à savoir un comportement excessif qui se manifeste par la réponse « tout à fait d’accord » ou « plutôt oui », et un comportement plus raisonné de fans qui se manifestent par un point de vue neutre.
            En effet, dans le schéma ci-dessus, nous voyons un premier groupe de fans, entourés d’un cercle vert, caractérisés (par les points roses) par une forte relation avec la marque, un grand intérêt et connaissance en la marque (culturellement et en termes d’actualité), une implication communautaire importante, une grande implication temporelle, une fidélité à la marque marquée par la pérennité dans sa relation avec les produits, qui a tendance à recommander la marque, qui a confiance en la marque et croit en elle. On définira ce premier groupe d’individus (marqués par les points bleus) appartenant au cercle vert comme étant des militants, c’est-à-dire les fans qui agissent et luttent pour une cause, les dimensions cognitives et affectives incitant à une dimension conative active, voire virulente.
            Dans un second temps, nous pouvons distinguer un second groupe de fans, cerclés de violet, caractérisés (toujours par les points roses) par une très bonne connaissance de la culture de la marque, qui est passionné par la marque et croit en elle, éprouvant du bien-être par l’expérience d’achat et la visite en magasin, lui reste fidèle en termes d’achat et d’investissement financier ce qui se manifeste également par un rejet des autres marques concurrentes, et qui finisse par recommander la marque qu’ils arborent. Ce groupe-là est marqué tout comme le premier par une forte affection envers la marque, mais se distingue de celui-ci par une plus faible implication en ce qui concerne ses actions envers la marque et son implication dans la communauté Apple. On parlerait d’ambassadeur, c’est-à-dire de représentants permanents de la marque, voire de partisans pour les plus fervents défendant leur opinion de la marque et faisant montre d’un parti pris par le rejet des marques concurrentes. On pourrait donc rescinder ce second groupe en deux catégories distinctes, si l’on faisait une étude graphique plus approfondie.
            Enfin, dans le schéma ci-dessous, nous pouvons distinguer un troisième et dernier groupe de fans, clos par un cercle orange, caractérisés par une forte relation avec la marque, un grand intérêt et connaissance en la marque par une certaine neutralité pour chacune des dimensions composant le concept de fanatisme lié à la marque. On les définira donc comme les sympathisants, c’est-à-dire approuvant le concept d’Apple et ses produits sans y adhérer complètement.
IV. CRITIQUES
            Suite à cette étude, il nous est possible d’en tirer plusieurs points de vue critiques. En effet, au vu de nos connaissances, de nos ressources en termes de temps et de moyens financiers, plusieurs étapes du paradigme de Churchill n’ont pas pu être menées à bien telles que la purification de la mesure par l’Alpha de Cronbach ou la phase de validation qui consiste à estimer la fiabilité de l’étude menée par le Spit Alf et le développement de normes par l’étude de la matrice multiattribut.
            Il faut noter également que notre étude se limite à la marque Apple, et que bien que le fanatisme lié à la marque soit un comportement visible sur les marques en général, notre étude n’est pas applicable à toutes les marques existantes. Par exemple, dans le cadre de notre étude, Apple possède un point de vente spécialisé inclus au centre de plusieurs de nos questions ; cependant, toutes les marques ne possèdent pas un point de vente spécialisé, ce qui fait que notre étude est certes reconductible sur différentes marques, mais à ne pas appliquer à la lettre selon les marques étudiées. Cela dit, bien que les items seront différents de par les spécificités de chacune, les composantes et sous-composantes qui sont elle, plus générales, resteront similaires.
            En outre, bien que nous ayons essayé de limiter les biais de désirabilité sociale dans les réponses des usagers adeptes de Apple, la notion même de fanatisme voire de fans en général, induit une vision négative des répondants vis-à-vis des termes cités précédemment, ce qui se ressentait notamment lors de commentaires virulents sur des sites communautaires dédiés aux fans Apple au sujet de l’étude en question. Il en résulte donc que certaines réponses de notre cible sont pondérées et réfléchies et dissimulent le vrai comportement du fan, refusant le fait que leurs actes puissent dépendre de leur impulsion, et de l’influence qu’ont sur eux les produits Apple. Nous nous heurtons donc ici aux limites traditionnelles du déclaratif et de la dissonance cognitive qu’il peut induire. De plus, les répondants se trouvent confrontés comme n’importe quels répondants au fait qu’ils n’ont pas totalement conscience de tous leurs actes, et peuvent inconsciemment dissimuler leur véritable comportement.
            De plus, cette enquête, de par ses moyens d’administration sur les forums et les réseaux sociaux, n’a pas permis de cibler précisément les militants de la marque Apple. Autrement dit, le groupe d’individus exprimant les degrés d’intensité les plus forts concernant les composantes également fortement présentes dans le concept de fanatisme religieux se trouve être délicat à cibler. L’idéal aurait par exemple été d’interroger des individus attendant le lancement d’un nouveau produit devant un Apple Store lambda afin d’augmenter nos chances d’obtenir les réponses d’individus ayant déjà exprimés via un comportement relevant d’un fort degré d’intensité concernant l’une des composantes clés du fanatisme religieux – autrement dit l’investissement personnel. Cette typologie de fan se trouve donc être sous-représentée au sein de notre échantillon.

CONCLUSION
              Dans un premier, nous avons pu mettre en avant que le concept de « fan » s’est plus ou moins banalisé. En effet, bien que le terme « fan » dérive du mot « fanatisme », les composantes illustratives de ce dernier nous montrent réellement un degré d’intensité dans le soutien accordé à la marque, ce qui le distingue de la puissance engendrée par le terme « fanatisme ». Ces deux termes sont donc bien à distinguer, puisqu’un fan supporte la marque, mais n’éprouve pas un engouement qui relève d’autant de ferveur, d’exaltation et de dévouement qu’un fanatique.
              Cela dit, nous nous sommes également penchées sur les composantes liées directement au fanatisme au sein de notre étude par la mise en avant d’un degré d’engagement caractérisé par le rejet, l’implication et l’investissement personnel. Ce groupe d’individus existe réellement bien que sous représentés, et se trouvent liés à la classe des militants qui caractérisent les fans les plus fervents.
              Ce concept même de « fanatisme » est bel et bien représenté par la marque Apple qui suscite cet enthousiasme lié à la marque par sa politique de communication et de distribution, comme par exemple les Keynotes et la mise en scène des ouvertures d’Apple Stores qui génèrent toujours des retombées médiatiques d’une grande ampleur, et redynamise l’intérêt des consommateurs pour les produits de la marque.
              En outre, la mise en avant des produits Apple a conduit à l’acceptation d’antonomases comme l’utilisation du mot « iPod » qui définit l’ancien terme « mp3 ». On peut donc en déduire qu’Apple a su générer un effet de halo autour de ses produits, ce qui a renforcé l’attachement des utilisateurs de produits Apple à la marque en elle-même.
              Si notre étude se veut généralisée sur le concept du fanatisme lié à la marque, il ne faut toutefois pas étendre notre étude au monde puisque par exemple les utilisateurs asiatiques de la marque Apple n’ont pas le même rapport à la marque en raison de leur culture et leur éducation. Notre étude est donc propre au territoire français.
              De plus, c’est la culture de la marque Apple qui génère par sa politique de communication et de distribution, comme nous l’avons dit auparavant, la transformation du client en un fan très rapidement. Ce phénomène accéléré est propre à la culture de cette marque. Ainsi, nous pouvons constater que certains utilisateurs sont happés par ce phénomène alors qu’ils ne sont que des suiveurs. Le concept de « fanatisme lié à la marque » est donc à analyser de manière très pondérée et réfléchie.
              D’autant plus que l’acte de consommation tourné vers soi est devenu progressivement un acte de communication tourné vers autrui. La nature de l’achat nous le signale dans le but de montrer ce que nous voulons bien laisser paraitre, et non ce que nous sommes réellement. La marque Apple, d’abord symbole de la contre-culture et d’individualité, représente désormais un symbole massif de « coolitude ». De ce fait, il serait légitime de se demander si le fanatisme ne prend finalement pas sa source dans la mentalisation de la marque, autrement dit ce qu’elle projette de nous idéalement aux yeux d’autrui, plus que dans des éléments plus stables tels que son physique ou sa personnalité.
BIBLIOGRAPHIE
 - Les marques sont mes amies sur Facebook : Vers une typologie de fans basée sur la relation à la marque et le sentiment d’appartenance, Agnès HELME-GUIZONCO et Fanny MAGNON, Maîtres de Conférences, IAE Université Grenoble-Alpes.
 - L’apport de l’ethnographie multisite à l’étude du consommateur fan, Anthony GALLUZZO, Doctorant contractuel chargé d’enseignement Centre de Recherche en Management, IAE Université Toulouse 1 Capitole et Jean-Philippe GALAN, Professeur des Universités Centre de Recherche en Management, IAE Université de Valenciennes et du Hainaut Cambrésis.
 - L’attachement à la marque : proposition d’une échelle de mesure, Jérôme Lacoeuilhe, IUT Sénart-Fontainebleau, Université Paris XII Val-de-Marne, IRG Laboratoire marketing et logistique.
 - Les déterminants de l’attachement émotionnel à la marque : Effet des variables relationnelles et des variables relatives au produit, Fatma SMAOUI, Enseignant-chercheur, Institut Supérieur de Gestion, Université de Tunis URM (Unité de Recherche en Marketing) 
 - TECHTRENDS, Les fanboys sont-ils des fanatiques d’Apple ? Christophe LEFÈVRE, 7 juillet 2010, http://techtrends.eu/les-fanboys-sont-ils-des-fanatiques-dapple/
ANNEXE
Réponses au questionnaire
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